Akisu
sur Kuro Shin Edo au format (124 Ko)
Retranscription de l'enregistrement retrouvé dans l'appartement 211 de l'immeuble Hinan, quartier Harajuku. Ce soir, je ne serai plus. Cette certitude grandit en moi depuis l'aube et me tétanise d'effroi. C'est seulement au prix d'un colossal effort, que je suis enfin parvenue à activer ce satané enregistreur vocal. Je laisse ici mon histoire, si le temps me le permet, pour que demeure une trace de mon existence et de cette maudite période, et afin de mettre en garde quiconque écouterait ...Contient : histoire (8)(...) C'est seulement au prix d'un colossal effort, que je suis enfin parvenue à activer ce satané enregistreur vocal. Je laisse ici monhistoire, si le temps me le permet, pour que demeure une trace de mon existence et de cette maudite période, et afin de mettre en garde quiconque écouterait cet enregistrement qu'il doit se résigner par avance : la mort attend à chaque coin de rue et peut revêtir diverses formes, des plus belles aux plus abjectes, et il n'est aucune échappatoire. (...)
Comme beaucoup de ressortissants étrangers, je me suis retrouvée coincée dans ce bourbier le 4 mai dernier, alors que je ne devais rester que quelques mois afin de parfaire ma thèse enhistoirecontemporaine dans l'une des universités de Shin-Edo. Ce soir-là, hier soir précisément, j'étais affalée sur un siège du bar Buruburu, un endroit miteux, entièrement décoré selon l'esthétique des vieux films d'horreur nippons à la Dark Water ou Ring. (...)
Après d'interminables minutes où sa voix mélodieuse semblait comme suspendue dans le vide qui paraissait nous entourer, l'homme se pencha au-dessus de moi, plongea longuement son regard dans le mien, me sourit affectueusement, puis me dit : « Je vais te raconter unehistoire, ma chère petite, unehistoiredes plus cruelles... la mienne ». Avant le jour du grand bouleversement que tout le monde appelle l'Incident Kuro, je menais une existence privilégiée. J'étais le patron réputé et admiré d'une zaïbatsu spécialisée dans la fabrication et l'export de technologies de pointe. (...)
Croyant tout d'abord à un rêve, les souvenirs me revinrent en masse dès que je parvins à me relever. Pourquoi l'Akisu avait-il voulu me raconter sonhistoire? En quoi cela me concernait-il ? Et pourquoi cette désagréable sensation de déjà vu ne me quittait-elle pas ? (...)
Tout ce qu'il me fallait à présent, c'était rentrer chez moi, passer une bonne nuit de sommeil et oublier toute cettehistoire. Le pas encore hésitant, je réussis tout de même à regagner mon appartement ce soir-là et à m'affaler sur mon lit. (...)
Ouvrant timidement les yeux, je découvris, posé sur mon lit juste à côté de moi, un chapeau d'enfant dans le plus pur style londonien. Saisie d'effroi en me rappelant l'histoirede l'Akisu, je hurlai en balayant l'objet d'un revers de la main. Quelques instants plus tard, le temps de retrouver un peu de mon calme, je voulus aller chercher ce maudit chapeau, bien décidée à me débarrasser de lui pour enfin oublier toute cettehistoire. Mais une sourde panique commença à me gagner lorsque je constatai qu'il ne se trouvait pas sous la bibliothèque, là où je l'avais vu disparaître. (...)