Sucrée Maison
L'auberge. Et alors ? On y passe, on y lape un brouet qui tue la faim, on y tombe de sommeil. On la quitte bientôt, avec pour souvenirs le dessin de l'enseigne, le minois d'une servante, le goût d'une sauce : d'autres auberges vont suivre, qui vont se confondre avec celle-là. Bien sûr, quand on rencontre d'autres gens du Voyage, les soirées à l'auberge prennent de la saveur. Chacun y va de son histoire incroyable, de sa fanfaronnade, de sa brève de voyage. Une bonne occasion pour faire briller les ...Contient : occupant (8)(...) Ils ne sont pas seulement les raisons d'inutiles angoisses, car seule l'expérience permet peu à peu aux Voyageurs de comprendre quelle est la loi qui régit ces retours. La voici : le dernieroccupantde l'auberge y revient instantanément et à son insu, dès qu'il s'endort. Il s'agit en l'occurence d'un Voyageur, mais pas nécessairement celui qui est revenu en premier : si lors du prochain départ, un autre franchissait en dernier le seuil, c'est lui qui reviendrait à l'auberge. (...)
Cela tend à prouver qu'elles ne sont pas intelligentes : malgré tout, il faut que les Voyageurs prennent sur eux pour ne pas les soupçonner de la malédiction qui s'abat sur le dernieroccupantparti. Or, ces bizarres Chevelures ne sont qu'une expression de la folie de l'Evidentin. Elles n'ont rien à voir avec quoi que ce soit, et ne servent, du point de vue du scénario, qu'à courir sur les nerfs des Voyageurs. (...)
Ce plan peut aussi être admis si les Voyageurs ont épuisé les autres possibilités, et surtout la plus évidente : trouver un dernieroccupant... Récompensons donc la ruse, jusqu'à un certain point néammoins. L'Entité d'auberge, assoupie par l'endorlotte, laisse échapper ses proies, mais cela fend le coeur de penser à elle, seule, désolée, craquant tristement de toutes ses poutres pour appeler des clients. (...)
Mais ce n'est pas la seule issue, il y a plus cruel : après tout, il suffit qu'une personne reste dans l'auberge, tous les autres sont libres ! Qui va être le dernieroccupant? Un Voyageur ? Cette solution n'est envisageable que si la compagnie se déchire, ou par ignorance du sort du dernieroccupant(voir Le lendemain) ; la charmante auberge peut aisément devenir un enfer si les Voyageurs ont des personnalités fortes. 'Tu pourrais rester, toi, pour te reposer - nous reviendrons pour te délivrer, bientôt. (...)
Supposons plutôt que les Voyageurs soient liés par une indéfectible amitié (et par le désir mystique commun de finir le scénar). Il faudrait alors qu'ils trouvent un autre imbécile que l'un d'entre eux pour dernieroccupant: une créature de ce rêve, en tous cas - comme ils le constatent, des créatures invoquées ne suffisent pas ; il faut des clients sérieux à l'auberge. (...)
Rappelons que si les Voyageurs ont compris par eux-même et assez vite la loi magique de l'auberge, Gahl n'intervient pas dans cette histoire. Il constitue une proie trop facile à berner, un dernieroccupanttout désigné : comme il est plutôt pénible, quoique pas méchant, c'est même une revanche... (...)
Nos hôtes savent à quoi s'en tenir concernant l'auberge : ils ne peuvent ignorer que s'ils faussent compagnie à Auloï (c'est si facile - il dort comme une tombe), le messager ne va jamais atteindre Faterdin, qui est située encore à deux ou trois journées de galopade. Car il va être le dernieroccupant, prisonnier des bras tendres de l'auberge. Les Voyageurs s'en tirent, enfin ! Mais le message ne sera pas délivré, Quiriet tombera, et des centaines de personnes seront victimes des Sagouins. (...)